Discours de Jean_Luc Mélenchon à la Bastille, 18 Mars 2017

Je savais que vous seriez là !

Je savais qu’elle est inépuisable, la vague qui nous porte, génération après génération, de la Bastille à la République.

Écoutez ! Écoutez, vous tous, cette clameur qui monte de nos rangs. Ce son n’a pas de nom, comme le bruit du vent dans les feuilles, comme celui de la pluie sur le pavé.

Ce son n’a pas de nom mais il est un signal : celui de la force du peuple quand il surgit dans son Histoire !

Ce rugissement qui passe sur nos fils, c’est celui du lion de bronze au pied du monument dont l’auteur a voulu qu’il symbolise le suffrage universel, celui qui, bientôt, va parler et fixer notre destin.

Nos voix montent vers cette femme que voici : Marianne, la République, la République inachevée tant que le peuple n’est pas souverain dans son pays en tout et pour tout !

Regardez-la ! Elle porte fièrement le bonnet des affranchis, celui de la liberté retrouvée, celui de la servitude rompue.

À notre tour, nous épousons son insoumission, nous la faisons nôtre.

Nous avons marché, une fois de plus, de la Bastille à la République. De la Bastille où commencent tous les élans de la liberté du peuple de France puisque c’est là que fut abattu, pour la première fois, le symbole de la monarchie et de la caste des privilégiés. Parce que c’est là-bas qu’a été brûlé le dernier trône des Rois. Parce que c’est là-bas que s’est faite la première manifestation féministe pour arracher le droit de vote des femmes.

Et c’est là-bas qu’il y a cinq ans nous avons entrepris ce que nous poursuivons aujourd’hui avec constance et cohérence, avec confiance et patience, et jusqu’à la victoire !

Dans nos rangs, passent aussi les ombres des pauvres visages de l’humanité humiliée, les noyés de la Méditerranée, les suicidés au travail, les morts d’abandon dans la rue, tous ceux qui souffrent de ce monde écœurant où l’accumulation des uns se nourrit de la détresse sans fin des autres !

Ces autres, nous sommes leur revanche ! Nous sommes leurs sourires d’avant, nous sommes leur dignité intacte et l’espérance lumineuse des jours meilleurs !

Puissants de la Terre, puissants de la Terre, nous voici ! Nous sommes, une nouvelle fois, au rendez-vous de notre Histoire ! Le jour anniversaire du commencement de la glorieuse Commune de Paris qui inventa la République sociale !

Sur cette place, devant le monument édifié pour le centenaire de la révolution de 1789 qui a fait de nous un peuple un et indivisible, non du fait de nos ancêtres, de notre couleur de peau, ni même de notre parler, mais de l’horizon qui nous rassemble pour toujours : Liberté-Égalité-Fraternité !

Et nous ne voulons rien d’autre que cesse le mensonge et l’hypocrisie qui consiste à écrire la devise sur tous les frontons de France et, ensuite, agir exactement à son contraire !

Nous voici pour proposer la 6e République sur cette place où fut annoncée la 5e dont nous voulons tourner la page !

Sur cette place où naguère le peuple de Paris s’est assemblé après les attentats et les crimes destinés à le terroriser et à le diviser. En vain ! La force du peuple a gardé son unité, la force du peuple assemblé a tout surmonté !

Sur cette place encore où se retrouvaient, après chaque manifestation contre la loi El Khomri, les assemblées de Nuit Debout qui ont, jour après jour, au prix du rêve, dessiné l’épure d’un monde nouveau où de telles lois ne feraient plus la loi parce que nos vies méritent mieux qu’elles.

Une fois de plus, de Bastille à République, un fil rouge unit les boulevards l’un à l’autre. C’est celui de nos luttes et de nos engagements, de nos drapeaux toujours tenus haut.

Une fois de plus, nous le proclamons, sans nous, rien n’a de sens en France !

Nous voici non pour nous, non pour cet instant, mais par vertu, pour toi, notre peuple ! Et par amour, pour toi, notre France !

Peuple de France, et toi, le monde qui nous regarde si souvent étonné, nous sommes la révolution citoyenne toujours recommencée comme la passion de ce peuple pour les droits universels des êtres humains et des citoyens qu’ils veulent être.

Ces droits, qu’il a proclamés le premier, et qu’on voit dans cette déclaration que tient, ici devant vous, la Marianne de bronze.

Aujourd’hui, tant de gens sont venus, et parfois de si loin ! Oh, combien nous avions besoin de sentir notre force ! Elle est notre liberté. Elle est le feu qui brûle en nous et ne s’éteindra jamais. Elle est le recours dont dispose la France en toutes circonstances et d’abord son peuple de travailleurs.

De cette montée en masse, je prends la part de sympathie et d’encouragement personnel qu’elle comporte évidemment. Mais cela ne doit faire perdre de vue à personne que nous ne sommes pas là pour un personnage mais pour un programme, que ceci n’est pas seulement un évènement extraordinaire à l’intérieur d’une campagne électorale comme jamais on n’en a vu. Ceci est une manifestation politique, une insurrection citoyenne conte la monarchie présidentielle.

Nous sommes venus ici, de partout, proposer à notre peuple de mettre fin à la monarchie présidentielle et à sa collusion intime avec les puissances de l’argent qui la subjuguent et la dominent !

Toute la situation nous invite à la ferveur que nous exprimons. Si tant de gens se sont rassemblés aujourd’hui, c’est qu’ils savent. Ils savent combien l’heure est grave pour leur pays ! Entre l’extrême-droite qui voudrait la nation ethnique et les serviteurs de l’argent-roi qui n’en finissent plus de vouloir détruire l’État et les services publics, le pays, sans nous, serait menacé de dislocation.

À partir de cette place, nous voulons proposer une issue positive que contient notre bulletin de vote. Une sortie de l’impasse où l’ont enfermé, depuis au moins dix ans, des dirigeants frivoles qui n’ont pas d’autre vision du monde que ce dogme grossier d’après lequel le marché et la finance seraient, en dernière analyse, les seuls régulateurs légitimes de la civilisation humaine. Là où nous disons : c’est la fraternité, c’est l’amour, c’est le soin des autres qui est la raison d’être de la société !

C’est au nom de ce dogme, et de leur incapacité personnelle à tenir tête à quoi que ce soit, et à faire quoi que ce soit d’autre que de céder toujours à ceux qui semblent le plus forts, c’est au nom de cela qu’ils ont perpétré la pire des forfaitures en démocratie : la trahison du vote du peuple, la négation de sa volonté, l’inversion de sa décision.

En 2005, et en 2012, contre le vote des Français, contre leur volonté clairement exprimée, Messieurs Sarkozy et Hollande, présidents successifs de la 5e République, ont donné, sans aucune légitimité, l’accord de la patrie pour une organisation de l’Union européenne qui confisque la souveraineté du peuple et le soumet à la souveraineté de l’argent.

Dans cette construction, tous les pouvoirs ont été confiés à une banque centrale totalement indépendante dont l’unique mission est la protection de la rente.

Cette construction interdit l’harmonisation sociale et l’harmonisation fiscale entre les pays. Elle organise, de cette façon, une compétition sans fin entre les peuples et dans les nations de sorte que partout sont encouragés les nationalismes les plus aveuglés et les xénophobies les plus absurdes.

L’échec de cette construction éclate sous les yeux du présent.

La profonde aspiration des peuples de toute l’Europe à la paix – régime de la bienveillance – et au progrès social – régime du soin des autres – ces sentiments sont, depuis, totalement dévoyés.

Il faut donc que TOUT soit désobéi et rediscuté !

Pour finir, c’est au peuple et à lui seul, une nouvelle fois, que sera demandé, le moment venu, par une consultation populaire référendaire, ce qu’il voudra faire à propos de ce que j’aurais négocié en son nom. Et pour le futur, quoi qu’il arrive, tous les traités qui, d’une manière ou d’une autre, visent à déléguer telle ou telle part de la souveraineté du peuple comme parfois cela est nécessaire, tous ces traités seront automatiquement soumis à l’approbation référendaire du peuple !

D’ores et déjà, la parole de la France ayant été engagée de façon inconsidérée, je dis que si vous m’élisez, JE NE SIGNERAI PAS LE CETA !

Ni l’accord de libre-échange avec le Canada – et le peuple canadien est notre ami – ni aucun traité de libre-échange avec qui que ce soit, car cela n’aboutit qu’à tout détruire. Et chaque fois qu’il faudrait aliéner nos normes sociales et nos normes environnementales, j’en fais le serment, la réponse, ce sera : Non !

Si tant de décisions destructrices ont pu être prises sans que jamais nous n’ayons eu notre mot à dire, c’est parce que la constitution de la 5e République en donnait les moyens. Faisons la part des choses, le temps étant passé. Cette constitution avait été taillée sur mesure pour un homme exceptionnel, dans des conditions exceptionnelles, pour faire face à un contexte exceptionnel !

Ce temps est révolu mais il en reste un texte qui ne doit pas tomber dans certaines mains car il offre à la monarchie présidentielle des moyens incroyables de pouvoir absolu. L’un après l’autre, ces pouvoirs ont été utilisés. Qui pourrait oublier ici, comment, contre l’avis du peuple mobilisé, et du Parlement garrotté, a été déclenché le feu de l’article 49-3 de la constitution à six reprises : trois fois pour imposer la loi Macron, trois fois pour imposer la loi El Khomri ! C’est par ce moyen de violence incroyable, dans une grande démocratie, qu’a été renversé de fond en comble tout l’ordre public social de notre République !

J’en déduis que si je suis élu, il faudra, tout de suite, abroger la loi Macron, abroger la loi El Khomri.

La nouvelle constitution devrait rendre intouchable la trame fondamentale de l’ordre public social républicain. Il ordonne que soit placée au sommet de la hiérarchie des normes la loi voulue par le peuple et que les autres accords, de branche ou d’entreprise, ne puissent qu’améliorer la loi ! On ne doit plus supporter qu’il soit possible d’édicter un code du travail par entreprise sous la menace du chômage, pas davantage qu’on imaginerait un code de la route par rue sous la dictée des chauffards !

La nouvelle constitution doit être sociale d’abord ! Elle doit permettre de répliquer aux ravages des politiques de délocalisation dont une sur deux, compte tenu de la compétition de tous contre chacun, s’opère à l’intérieur de l’Union européenne qui était sensée nous protéger.  Et contre le pillage, le saccage des entreprises, il nous faut encadrer la liberté aujourd’hui absolue qui est celle des actionnaires, qu’il s’agisse de personnes ou de fonds financiers qui sont autant de parasites et de sangsues posés sur le corps productif. Pour cela, les travailleurs doivent recevoir des droits constitutionnels qui les rendent citoyens dans l’entreprise puisque la République qui a vaincu les monarques dans la cité les y a laissés serfs !

Il faut qu’ils aient le droit de remontrance et de défiance contre les décisions qui mettent en danger la pérennité de l’outil de production.

Il faut qu’ils aient le droit de préemption en coopérative, c’est-à-dire le droit de devenir pleinement et légitimement les propriétaires de l’outil de travail quand celui qui le possède prétend le vendre.

J’ai commencé ma démonstration du grand changement qu’il faut opérer dans l’organisation de notre démocratie par ces questions sociales. Oui, j’ai voulu balayer tout de suite l’idée que faire une constitution, ce serait au fond s’occuper de choses assez abstraites qui ne concerneraient que l’organisation des pouvoir publics.

Non ! Écrire une constitution, c’est décrire le type de société dans laquelle on veut vivre en disant quels sont les droits que l’on se reconnaît les uns envers les autres, et les uns envers les autres avec la nature.

Notre projet est celui d’une société bienveillante et douce pour ses membres, une société pacifique et démocratique, soucieuse de la dignité de chacun et des moyens d’y pourvoir, une société qui veut vivre dans l’harmonie entre ses membres, qui ne supporte pas la misère et la pauvreté au milieu de l’opulence ! Une société qui trouve enfin le chemin de son harmonie avec l’écosystème naturel, notre patrie commune à nous tous, les êtres humains.

En convoquant une assemblée pour écrire cette constitution, nous utilisons une méthode qui, de fait, met fin au règne des hommes et des femmes providentiels, des comités d’experts de toute sorte qui, sans cesse, se substituent à l’intelligence collective que forme le peuple tout entier.

Il ne peut pas être question que, comme en 1958 cela fut fait, un comité d’amis rédige un texte qui convienne au chef et le propose ensuite au peuple comme un plébiscite personnel. Dans ces conditions, c’est une assemblée qui doit être constituante. Elle doit prendre le temps de faire son travail en écoutant ses membres et en écoutant surtout, beaucoup, le pays lui-même !

Il y a urgence ! Il y a urgence à abolir la monarchie présidentielle actuelle. Écoutez-moi, je sonne l’alerte. Mesure-t-on bien aujourd’hui les dangers que ce texte permet si son usage tombait en certaines mains d’apprentis-sorciers ?

L’article 16 de la constitution actuelle donne des pouvoirs spéciaux, absolus, au Président de la République sans contrôle pendant trente jours.

L’article 35 donne la possibilité au gouvernement d’envoyer des troupes sans vote du Parlement pendant quatre mois.

L’article 36 permet au conseil des ministres de décréter l’état de siège pour douze jours et de transférer le pouvoir aux militaires.

C’est le transfert qu’on hue, c’est pas les militaires hein ! Eux ils servent et ils obéissent comme c’est leur rôle. Pour la patrie.

L’article 13 donne au Président le droit de nommer aux plus hautes fonctions civiles et militaires. J’arrête là une liste que je pourrais allonger. Beaucoup de ces dispositions ont déjà été utilisées. Mais j’alerte : elles pourraient être de nouveau utilisées dans d’autres circonstances, et pour d’autres objectifs.

Françaises, Français, ne confiez pas – fut-ce pour une période transitoire – à des gens déterminés à en faire l’usage qu’ils vous annoncent déjà, quand ils se prosternent devant l’ethnie ou devant l’argent !

Dans l’ambiance actuelle de l’Europe, et dans l’ambiance actuelle de la France, est-il raisonnable qu’un tel pouvoir personnel soit ainsi placé hors d’atteinte ?

Les gens ici assemblés proposent à la France d’y mettre fin. Je vous propose au contraire de maintenir en toutes circonstances une capacité d’intervention directe du peuple, en sorte qu’à tout moment, et du moment qu’en seraient réunies des conditions qui seraient à fixer – comme le nombre des pétitionnaires – un référendum puisse être organisé qui autorise la fin du mandat de n’importe quel élu, du maire, du conseiller général et bien sûr, aussi, du Président de la République !

À nous qui sommes les témoins et les porte-parole de la force du peuple, voici notre maxime : quel que soit le problème, la solution est le peuple !

On observe, à juste raison, que depuis 1958, ce peuple qui était alors rural est devenu massivement urbain. On observe qu’il s’est mélangé toujours et davantage par vagues successives. Et nous sommes de ceux qui se réjouissent de la part de bonheur que tout ceci apporte dans notre vie collective.

Mais après que tant de cupidité, tant d’exaltation absurde du pouvoir de la richesse, qui ne se concentre qu’au prix de la misère des autres, bref, notre peuple a été divisé, notre peuple a été éparpillé, notre peuple a été éclaté par ses statuts précaires, ses aller-retour entre un chômage de masse et une activité provisoire. Et tout cela a marqué les esprits, tout cela nous a fait maintes fois perdre de vue ce qui, pourtant, nous était commun.

Écrire une constitution ensemble, c’est d’abord décréter que nous sommes, qui que nous soyons, égaux en droits, et que c’est ensemble que nous nous reconnaissons mutuellement des droits. De la sorte, en écrivant la constitution, c’est le peuple lui-même qui se refonde et s’amalgame en un tout pour redevenir la République une et indivisible !

Pour qu’il en soit ainsi, et pour que nous décidions chacun avec son point de vue, avec son histoire, et sa propre trajectoire, pour que chacun puisse apporter librement sa contribution à la réflexion collective, il faut, par-dessus tout, protéger la liberté absolue de conscience des êtres humains que nous sommes !

Bien sûr, c’est l’affaire de la laïcité. L’État et les églises doivent être rigoureusement séparées. Il n’y a besoin pour cela, il n’y a besoin pour cela que d’appliquer la loi. Sans excès d’impatience. Sans mélanger ce qui tient de la loi et ce qui tient des convictions personnelles. Mais avec la tranquille assurance de ceux qui savent qu’en toutes hypothèses, chacun d’entre nous serait en première ligne si la liberté d’un seul d’entre nous était mise en cause, quel qu’en soit le contenu.

Au fond, il faut que la loi s’applique. Et il faut pour cela, d’abord, et avant maints bavardages, qu’elle s’applique partout, à tout le monde. Et dans les mêmes conditions ! En particulier, tous les territoires de la République doivent bénéficier de la bienfaisante laïcité de l’État. C’est pourquoi tous les régimes concordataires, ceux d’Alsace-Moselle, ceux de Guyane, et ceux de tous les autres territoires concernés, seront tous abrogés.

Entrer encore davantage dans les devoirs que nous fixe la liberté… La liberté de conscience a un pendant évident, une liberté humaine fondamentale, celle de disposer entièrement et absolument de soi. Il est donc temps, il est donc temps d’inscrire dans la constitution le droit à l’avortement car le corps de chaque femme, car le corps de chaque femme lui appartient absolument et exclusivement ! Cette liberté doit être inscrite dans la constitution pour ne plus jamais être soumise à des soubresauts électoraux comme ceux qu’on a pu observer en maints pays, en Pologne ou aux États-Unis avec les résultats que l’on sait !

Notre pays n’est pas protégé contre de telles infamies. Il s’agit d’un droit inaliénable et la constitution doit le proclamer solennellement.

C’est dans le même état d’esprit et avec, au cœur et dans la conscience, d’abord l’idée de ce qu’est la dignité humaine à laquelle chacun d’entre nous aspire du plus profond de son être, c’est en pensant à cela que je défends personnellement – la Constituante en disposera – que l’on inscrive, dans la loi fondamentale, le droit au suicide assisté.

Et quand vient le moment de se mesurer, quand vient le moment de se mesurer à ce contre quoi on ne peut plus rien, sinon d’opposer sa liberté de décider d’éteindre la lumière, alors il faut la main secourable qui vous y aide. Ultime liberté qui donne son sens à une vie vraiment humaine.

Ces droits individuels sont nouveaux, bien sûr, comme le sont les circonstances et les moyens qui ont permis qu’ils émergent. On ne pouvait pas bien sûr plaider pour la liberté et la neutralité du net avant qu’il existe ! Mais puisqu’il existe, alors c’est une liberté fondamentale et il faut la garantir !

L’œuvre constituante doit répondre aux défis de son temps et d’abord à celui qui est lancé à toute la communauté humaine et qui met en cause la pérennité de la civilisation elle-même.

Pour l’heure, le plus grand de tous les défis, et la plus grande responsabilité avant toute chose pour une grande nation techniquement avancée comme la nôtre, c’est que le changement climatique est commencé et qu’il faut savoir si on y répond chacun pour soi ou tous ensemble.

Certes, nous n’avons pas besoin de changer la constitution pour mettre en place la planification écologique, passer au 100% d’énergies renouvelables, sortir du nucléaire, et rompre avec l’abominable agriculture chimique qui, aujourd’hui, empoisonne et malforme les générations qui viennent.

Mais si on n’en a pas besoin pour tout cela parce que la loi y pourvoira, nous avons cependant le devoir de nous fixer une règle générale impérative qui nous oblige à changer nos manières de produire, et d’échanger, et de consommer ! Cette règle, c’est la règle verte ! Elle vaut bien mieux, et plus utilement que leur prétendue règle d’or qui est la seule vertu qu’ils honorent ! On se guérit d’un mal d’argent, on ne se guérirait pas de la destruction de notre monde !

La règle verte, c’est ne plus prendre à la nature davantage que ce qu’elle peut reconstituer. Ce défi technique et scientifique est la clé du nouvel humanisme dont nous portons les couleurs. Nous devons décider d’avancer, une fois pour toutes, le plus loin possible dans la compréhension de ce qui compte aujourd’hui comme jamais on ne s’en était rendu compte dans le passé.

Nous devons décider qu’il existe des biens communs inaliénables ; que l’air et l’eau sont ces biens communs, comme le savoir, les arts et la culture qui améliorent ce qu’il y a d’humain en nous.

Mais ces biens communs – l’air, l’eau – ils doivent être la propriété collective de la nation. C’est à elle qu’il revient d’en assurer la protection et d’en faire payer la réparation à ceux qui les détruisent !

Allez ! Avançons encore plus avant !

Au total, c’est un état d’esprit nouveau qu’il faut construire. Nous devons admettre pour de bon que la biosphère est un tout qui doit être respecté comme tel. Nous devons donc admettre et inscrire dans notre constitution que nous interdisons le brevetage du vivant. Et sans doute faudra-t-il aussi, proclamer comme une règle pour toujours, comme une preuve de notre amélioration collective, la règle que les animaux ne sont pas des choses et que la preuve de notre humanité consciente se constate quand nous décidons de faire respecter ce principe.

Je ne peux quitter cette place et finir ce que j’ai à dire sans vous demander de la regarder. La Marianne de bronze qui est là tient au bout de ses doigts un rameau d’olivier. Pensez-y ! Pensez-y FORT ! C’est le symbole de la paix !

Vous tous ici, et vous qui nous écoutez, à cet instant, entendez quel est notre devoir commun : la paix est un bien précieux qu’il faut chérir et protéger.

En Europe et dans le monde, les guerres s’étendent, les armes s’amoncellent, les tensions de domination s’exaspèrent sur toutes les mers, sur tous les continents. Des dirigeants belliqueux se font face, en Europe aussi !

Nous, en France, nous avons un rôle utile et décisif à jouer pour construire et organiser la paix dorénavant menacée. Nous ne devons pas accepter que, selon la formule calamiteuse de l’actuel Président de la République, l’Europe se relance par la défense ! Car l’Europe de la défense, c‘est l’Europe de la guerre !

L’Europe de la défense ? Mais contre qui ? Mais avec qui ? Pour quoi faire ?

Nous connaissons trop bien les engrenages qui, d’un mot après l’autre, entraînent jusqu’à des points où plus personne ne contrôle rien ! Notre Histoire en est entièrement remplie et nos peuples en ont été suffisamment martyrisés pour que nous soyons devenus vigilants !

La France doit être une puissance IN-DÉ-PEN-DAN-TE politiquement et militairement. Elle doit refuser d’être entraînée par des systèmes d’alliance automatique dans des conflits qui pourraient surgir ici ou là et dont au fond elle n’aurait rien à connaître d’autre que de tenter de les empêcher !

Nous voulons la paix et donc nous sortirons de l’OTAN si cette responsabilité nous est confiée.

La France, à notre initiative, tendra la main à tous les peuples qui refuseront de s’aligner derrière l’un ou l’autre des empires qui dominent aujourd’hui le monde.

La France construira une alliance non-alignée, PACIFIQUE, œuvrant à la paix en toutes circonstances.

Mais si tel doit être le chemin que nous prenons, alors, bien sûr, il faut commencer par retirer de la constitution cette disposition dangereuse et absurde qui permet à un homme seul de décider d’une guerre.

Il le faut pour que la France sorte de l’escalade belliqueuse dans laquelle elle est entraînée depuis dix ans et où ses armes ont été engagées d’une façon bien dangereuse et bien hasardeuse sans qu’on ne sache jamais comment ce qui a été commencé pourrait se finir bien, pour la raison qu’on en avait aucune espèce d’idée en commençant !

Notre marche prouve que nous sommes capables de diriger le pays. Nous sommes capables de faire de notre pays le point d’appui pour les grands défis que l’humanité universelle doit relever.

Pour la part qu’il m’en reviendrait, j’y suis préparé.

Notre marche aujourd’hui, notre volonté de construire une nouvelle France en construisant sa 6e République, est en continuité avec cette pensée fondamentale exprimée par le grand Jaurès :

« La démocratie politique se résume en une idée centrale, ou encore une idée unique : la souveraineté politique du peuple. Dans le passé, il a fallu, souvent, que la France traverse de grandes épreuves pour se montrer, ensuite, capable de se ressaisir. C’est souvent par le tumulte et le fracas que tout s’est brisé et que tout fut ensuite à reconstruire. »

Nous lui proposons cette fois-ci un grand et profond changement radical acquis tranquillement, pacifiquement, démocratiquement, par la délibération collective d’une assemblée composée de membres élus ou bien tirés au sort parmi les Français.

Ô toi, mon peuple, il faut que tu changes tout si tu ne veux pas que tout change contre toi !

Il faut faire cette révolution citoyenne si vous ne voulez pas subir un coup d’État ethnique ou un coup d’État financier, ou les deux à la fois !

C’est donc à lui, à VOUS, d’opérer la séparation radicale de l’État, de la démocratie, de nos devoirs d’humanité d’une part, d’avec l’argent d’autre part.

Les gens, les gens, écoutez, c’est maintenant qu’il faut montrer ce que vaut le peuple souverain. Il faut que les bulletins de vote donnent le coup de balai, qu’ils les fassent tous, sans exception, dégager !

Il y a un nouveau mot d’ordre qui est né après « Résistance », c’est « Dégagez ! »

Dégagez pour que soient abolis les privilèges de la finance, ceux de la caste insolente qui occupe tous les pouvoirs et se les répartit, ceux de la monarchie présidentielle et de toutes les suites dorées du capital !

Voyez grand, peuple français, voyez grand pour votre patrie.

Vous ne le ferez jamais si bien qu’en lisant les poètes qui ont chanté la France et qui vous aident vous autres, nous autres en particulier.

J’achève mon propos, moi aussi, avec Victor Hugo. Je vous offre ce texte comme un message personnel, pour toujours, et comme signal de la gratitude que j’éprouve à cet instant, comme à tant d’autres auparavant, pour l’honneur que vous m’avez fait de me désigner comme votre porte-parole.

Qu’à travers moi, chaque petite Française, chaque petit Français, surtout s’il vient de loin, sache qu’il n’est plus grand cœur que celui de ce pays, qu’il n’est pas vrai qu’il se soit voué à la haine, et qu’il est toujours disponible pour la main tendue, le secours, la protection mutuelle, la joie, le bonheur d’être ensemble.

Allez, parle Victor Hugo :

« Aujourd’hui, pour toute la Terre, la France s’appelle révolution. Et, désormais, ce mot – révolution – sera celui de la civilisation jusqu’à ce qu’il soit remplacé par le mot « harmonie ».

Harmonie comme ce « phi » que nous avons choisi pour symboliser qui nous sommes à cette heure dans l’Histoire.

Oui, dit Victor Hugo, « tous, tant que nous sommes, grands et petits, puissants et méconnus, illustres ou obscurs, dans toutes nos œuvres, bonnes ou mauvaises, quelles qu’elles soient – poèmes, drames, romans, histoire, philosophie –, à la tribune des assemblées comme devant les foules du théâtre, comme dans le recueillement des solitudes, oui pour tout, oui toujours, oui pour combattre les violences, les impostures, oui pour réhabiliter les lapidés et les accablés, oui pour conclure logiquement et marcher droit, oui pour consoler, oui pour secourir, oui pour relever, pour encourager, pour enseigner, oui pour panser en attendant qu’on guérisse, oui pour transformer la charité en fraternité, l’aumône en assistance, la fainéantise en travail, l’oisiveté en utilité, l’iniquité en justice, la populace en peuple, la canaille en nation, les nations en humanité, la guerre en amour, le préjugé en examen, les frontières en soudures, les limites en ouvertures, les ornières en rails, les sacristies en temples, l’instinct du mal en volonté de bien, la vie en droits, les rois en hommes. Oui pour ôter des religions l’enfer et des sociétés le bagne. Oui pour être frères du misérable, du serf, du fellah, du prolétaire, du déshérité, de l’exploité, du trahi, du vaincu, de l’enchaîné, du sacrifié, du forçat, de l’ignorant, du sauvage, de l’esclave, du nègre, du condamné et du damné, oui nous sommes tes fils, République ! »

 

On a dit parfois qu’au motif que je me présente devant tous, j’aurais oublié d’où je viens et qui je suis et quelle est ma patrie dans le temps. Alors, ce jour anniversaire de la Commune de Paris, c’est à nous maintenant, pour ceux qui la connaissent, d’entonner, à la mémoire des nôtres, ce chant pour la liberté : l’Internationale !

 

Que chacun d’entre nous fasse ce qu’il a à faire. Pour ma part, je prendrai, de tout mon cœur et de toutes mes forces, la part de tâche qui m’est dévolue. Et je compte bien que chacun d’entre vous en fasse autant.

VIVE LA RÉPUBLIQUE !

VIVE LA FRANCE !

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